La reprise du travail, la fin d'un épisode douloureux


Le plus souvent, les personnes qui reprennent le travail après le traitement d’un cancer ont une représentation très idéalisée de ce moment-là, qui signifie pour eux la fin d’un épisode, plutôt douloureux, de leur vie. Le travail appartient à la vie « d’avant ».

Le retour au travail s’inscrit dans une évidence, celle de la normalité. Mais les traces de la maladie et des traitements sont toujours là, même si on ne veut pas les prendre en compte. Et la plupart des patients n’imaginent pas que leur retour au travail doit être préparé, en suivant un parcours précis, en plusieurs étapes.

Aussi, la confrontation à la réalité des impératifs du monde du travail ajoute encore au sentiment de perte de repères, à la perte de confiance en soi et dans les autres, caractéristiques de l’épreuve du cancer. Une reprise du travail qui se solde par un sentiment d’échec fait le lit de la dépression.

C’est pourquoi, la préparation est essentielle dans la réussite de son retour au travail. Téléchargez notre livret, qui a pour vocation de porter un éclairage sur les problèmes qu’il est possible de rencontrer lors d’une réintégration d’entreprise.

Si la patiente relève du secteur privé

Aptitude au poste

Pour le salarié du secteur privé, c’est le médecin du travail qui juge de l’aptitude médicale au poste de travail.

Si le salarié n’est pas en mesure de remplir les tâches de son poste ou si leur réalisation fait courir un risque pour sa santé, le médecin du travail le déclarera inapte totalement ou partiellement au poste.

Un reclassement sera alors demandé sur un poste en accord avec les possibilités du salarié ; soit l’employeur dispose d’un tel poste et accepte de l’attribuer au salarié, soit il n’existe pas de poste convenant aux possibilités et un licenciement est prononcé.

Invalidité et réduction de la capacité de gain

Le médecin-conseil du régime d’assurance maladie s’intéresse dans le cadre de l’invalidité à la réduction de la capacité de gain. Il peut arriver que les capacités de gain ne soient pas réduites des 2/3 et que le médecin-conseil n’attribue pas une invalidité alors même que le salarié est déclaré inapte au poste : le licenciement sera prononcé en l’absence de poste adapté. En effet l’employeur ne maintiendra pas à son poste un salarié jugé inapte par le médecin du travail sauf à engager sa responsabilité personnelle.

Le salarié licencié aura alors le statut de demandeur d’emploi. Il pourra demander à bénéficier d’un reclassement professionnel par la Commission technique d’orientation et de reclassement professionnel (Cotorep).

À noter que pour le salarié du régime général, l’arrêt de travail pour maladie ne peut aller, pour raison administrative, au-delà d’une durée de 3 ans. Au-delà de cette durée, le salarié qui présente une réduction de sa capacité de gain des 2/3 sera placé automatiquement en invalidité. L’invalidité correspond à une réduction de la capacité de gain et non à une infirmité : on peut être dans un fauteuil roulant et non invalide au sens de la Sécurité Sociale, tel un ministre jadis ou un astrophysicien actuellement.

Postes adaptés

Les entreprises sont tenues d’avoir dans leur personnel un pourcentage de travailleurs handicapés (6 %) ; elles peuvent s’exonérer de cette obligation en versant une cotisation à un organisme habilité.

Si la patiente relève de la fonction publique

Les fonctions publiques

Un fonctionnaire ne travaille pas, il assume des fonctions ; il n’existe pas d’accident de travail mais des accidents de service ; il n’est pas en relation avec des clients mais avec des usagers du service public, autrement dit la fonction publique connaît des principes et des règles de fonctionnement qui lui sont propres.

Il existe trois types de fonction publique :

  • la fonction publique d’Etat (police nationale, impôts…),
  • la fonction publique territoriale (agents des mairies, conseils généraux…)
  • la fonction publique hospitalière (personnel des hôpitaux médical ou non médical).

Concernant le sujet traité ici, il n’y a pas de différence entre les trois fonctions publiques.

L’aptitude aux fonctions

Tout agent de la fonction publique doit faire l’objet d’un examen médical par un médecin agréé afin de s’assurer de son aptitude médicale aux fonctions postulées (décrets n° 86-442, n° 87-602 et 88- 386 respectivement pour les fonctions publiques d’Etat, territoriale et hospitalière).

Les congés maladie des fonctionnaires

Le fonctionnaire peut bénéficier de trois types de congé en cas de maladie :

  • le congé maladie ordinaire (CMO)
  • le congé longue maladie (CLM)
  • le congé longue durée (CLD)

L’attribution d’un CLM ou d’un CLD se fait après avis du comité médical départemental sur demande de l’agent qui fournira un certificat médical à l’intention des médecins du comité médical. Le CLM est attribué pour une durée maximale de 1 an à condition que l’agent présente une pathologie figurant sur la liste des pathologies ouvrant droit à CLM.

Hormis ce cas, le CLM peut être attribué à titre exceptionnel sur avis du comité médical supérieur. Le CLM ne peut être prorogé au-delà d’un an sauf pour les pathologies ouvrant droit à CLD.

Les cinq pathologies ouvrant droit à un CLD

  • la tuberculose
  • la poliomyélite
  • les maladies psychiatriques
  • le SIDA
  • le cancer

Si au terme d’un an de CLM, l’agent ne peut reprendre ses fonctions et s’il est atteint d’une des 5 pathologies précédentes, il bénéficiera d’un CLD (l’année de CLM est alors incluse dans le CLD).

Pendant trois ans, le fonctionnaire en CLD perçoit l’intégralité de son traitement, puis pendant deux ans un demi-traitement. L’année de CLM correspond à la première année de CLD.

À chaque fin de période de CLM ou de CLD (en général période de 3 mois ou de 6 mois) les fonctions peuvent être reprises si l’aptitude a été retrouvée. La reprise des fonctions après CLM ou CLD peut se faire dans le cadre d’un mi-temps thérapeutique attribué par période de 3 mois sans que la durée totale puisse dépasser 1 an. L’avis du Comité Médical Départemental est requis à chaque demande.

Si l’agent n’est pas apte à la reprise des fonctions au terme de ses congés statutaires (5 ans de CLD en cas de cancer) il peut être mis en retraite anticipée pour raison médicale.

Le mi-temps thérapeutique

Il est particulièrement bien adapté pour pallier la fatigabilité souvent notée après le traitement d’un cancer du sein. On veillera toutefois à ce qu’il soit attribué sous la forme d’une demi-journée de travail quotidienne et non sous la forme d’une demi-semaine qui ne permet pas une récupération suffisante pour l’agent.

Il permet de juger des possibilités de l’agent au regard de ses fonctions et de la survenue de douleurs ou d’une stase lymphatique.

Mise en retraite anticipée pour invalidité

Elle nécessite que l’agent soit dans l’incapacité totale et définitive d’exercer ses fonctions (et non pas n’importe quelle fonction). Cela suppose que les fonctions de l’agent sont connues précisément. Un taux d’invalidité est alors retenu en référence au barème indicatif des Pensions civiles et militaires, dont une nouvelle version a été publiée en 2001 (Décret n° 2001-99 du 31.01.01, J.O. du 04 février 2001).

Le médecin agréé

L’administration s’attache un certain nombre de médecins agréés (anciennement assermentés) qui sont définis comme les « médecins de confiance de l’administration » et parmi eux un certain nombre de spécialistes (psychiatres, rhumatologues, oncologues…). Pour les pathologies cancéreuses, les médecins du comité médical qui sont majoritairement des généralistes requièrent l’avis d’un oncologue agréé pour les demandes de CLD, mi-temps thérapeutique, reprise à temps plein…

 

Les documents à fournir au patient

Pour un salarié

Un certificat sous pli confidentiel sera remis au salarié pour qu’il le transmette au médecin du travail afin de l’aider dans son évaluation de l’aptitude au poste.

Le patient sera informé du contenu du document afin d’éviter tout malentendu ainsi que des conséquences possibles de la remise de ce document. Le médecin du travail est bien évidemment soumis au respect du secret professionnel envers l’employeur.

Le médecin-conseil du régime général peut accéder au dossier médical de l’assuré et généralement, il convoquera celui-ci pour valider une prolongation d’arrêt de travail ou pour envisager une mise en invalidité (il n’est pas nécessaire d’attendre 3 ans avant de pouvoir mettre un assuré en invalidité à la différence de la fonction publique où l’agent doit avoir épuisé ses congés statutaires).

Certains de ces contrôles s’imposent au médecin-conseil afin de suivre le dossier de l’assuré. Il est souhaitable que le praticien et particulièrement le cancérologue éclaire le médecin-conseil par un certificat circonstancié qui permet parfois d’éviter un déplacement au patient.

Pour un fonctionnaire

Ici la mise en retraite anticipée pour invalidité ne peut survenir qu’au terme des congés statutaires (3 ans à plein traitement et 2 ans à 1/2 traitement dans le cadre d’un congé longue durée attribué pour une pathologie cancéreuse) et donc le médecin traitant (généraliste ou spécialiste) fournira au patient des certificats médicaux mentionnant la pathologie présentée et en quoi elle est incompatible avec l’exercice des fonctions.

Malheureusement, les fonctions ne sont pas toujours connues du praticien et la rédaction du certificat difficile. Le document est remis au patient qui l’adressera, sous pli confidentiel cacheté, au secrétaire du comité médical qui n’est autre qu’un médecin inspecteur de la santé. Le certificat sera joint à la demande administrative. Le comité médical demandera généralement l’avis d’un oncologue agréé pour rendre son propre avis.

Le cas du cancer du sein

Dans le cas du cancer du sein, l’oncologue s’efforcera de délivrer à sa patiente un certificat mentionnant le diagnostic (histologie et stade), les thérapeutiques administrées et énumérant les gestes impossibles ou interdits. Il sera fait mention du risque de Iymphœdème et des éléments qui le rendent plus probable (irradiation du creux axillaire, chirurgie de Halsted…).

Si le poste ou les fonctions sont connus, le médecin donnera son avis sur le risque qu’encourt sa patiente en reprenant son activité professionnelle. Les tâches ou gestes interdits seront indiqués afin de faciliter une éventuelle adaptation de poste.
Un support écrit concernant les précautions à prendre dans l’usage du membre supérieur sera remis à la patiente qui pourra le présenter au médecin du travail ou au médecin agréé.

 

 

Il reste tout de même difficile de donner de règle générale concernant la question du travail chez la patiente traitée pour un cancer du sein.

L’attitude sera fonction de données relevant de la patiente (type de chirurgie, propension au Iymphœdème,…), de la profession exercée (secrétaire, cuisinière, professeur d’éducation physique…), de la capacité à s’adapter aux contraintes liées au traitement reçu. Face à la multiplicité de ces données, il est rare que le médecin en charge de la patiente dispose de tous les éléments d’appréciation lui permettant de donner un avis assuré. Sa contribution consistera à éclairer le médecin du travail ou le médecin agréé sur la nature et le stade de la maladie, sur les séquelles présentes et sur ce qu’il convient d’éviter pour ne pas aggraver la situation de la patiente.

Préparer, anticiper et accompagner le retour au travail après un cancer


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